Approches instables

Kathy-FoxLa Liste de surveillance 2014 du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) souligne les enjeux qui font courir les plus grands risques à la sécurité du système de transport du Canada. L’un de ces enjeux concerne le risque d’avoir un accident durant l’approche et l’atterrissage. Au Canada, de 2009 à 2013, il y a eu chaque année, en moyenne, 150 accidents à l’approche et à l’atterrissage mettant en cause des aéronefs immatriculés au Canada.

Tôt dans leur formation, les pilotes apprennent qu’une approche stable est un facteur clé qui contribue à un atterrissage réussi. Une approche est considérée stable lorsque les critères suivants sont réunis  à une certaine altitude-sol (habituellement 500 pieds dans des conditions de vol à vue et 1000 pieds dans des conditions météorologiques de vol aux instruments) :

•    L’aéronef se trouve sur la bonne trajectoire de vol;
•    Seules des rectifications mineures au cap/tangage sont requises pour maintenir la bonne trajectoire de vol;
•    La vitesse d’approche est appropriée en fonction du poids de l’aéronef et des conditions environnementales, et se situe dans une plage de variation acceptable;
•    L’aéronef présente la bonne configuration d’atterrissage;
•    La vitesse verticale de descente convient au type d’aéronef et n’excède pas 1000 pieds/minute;
•    Le réglage de puissance de l’aéronef est approprié en fonction de sa configuration et n’excède pas la puissance minimale d’approche définie dans le manuel d’utilisation de l’aéronef;
•    Tous les breffages et toutes les listes de vérifications ont été effectués.

Le BST a mené plusieurs enquêtes sur des événements au cours desquels la poursuite d’une approche instable s’est soldée par un atterrissage avant la piste, un contact queue-sol ou une sortie de piste. « Une approche trop haute, et une descente trop abrupte et trop vite » est un thème récurrent. Selon les études , de 3,5 % à 4 % de toutes les approches sont instables. De celles-ci, 97 % se poursuivent jusqu’à l’atterrissage, tandis que seulement 3 % donnent lieu à une remise des gaz. Le BST a recommandé que Transports Canada exige que les exploitants assujettis à la sous-partie 705 du Règlement de l’aviation canadien surveillent les approches non stabilisées qui se poursuivent jusqu’à l’atterrissage et en réduisent la fréquence. Des recherches plus poussées sont nécessaires pour déterminer pourquoi les pilotes poursuivent des approches instables malgré les procédures normalisées des compagnies relatives aux critères d’approches stables et les politiques non-punitives visant la remise des gaz.  

Lorsque les élèves-pilotes apprennent à effectuer un atterrissage, il n’est pas rare qu’ils s’écartent de temps en temps de ce que l’on considère une « approche stable ». Il arrive souvent que l’instructeur de vol doit déterminer jusqu’où il peut laisser aller l’élève-pilote – à savoir si l’élève-pilote doit apprendre comment récupérer l’approche et l’atterrissage afin d’améliorer ses aptitudes et sa confiance plutôt que d’effectuer une remise des gaz et de réessayer à nouveau. Mike Cunningham, enquêteur principal, enquêtes aéronautiques, a récemment affiché un billet sur le blogue du BST dans lequel il écrit : « [S]ouvent, à cause de contraintes de temps, d’argent, et dans des conditions météorologiques que nous jugeons suffisantes, nous permettons aux élèves-pilotes de poursuivre l’approche. Pis encore, il arrive même que nous prenions les commandes de l’aéronef pour leur montrer comment les pilotes chevronnés s’y prennent. » Est-ce qu’enseigner aux élèves-pilotes qu’ils – ou que leurs instructeurs – peuvent tout de même récupérer une approche et effectuer un atterrissage en toute sécurité (la plupart du temps aux commandes d’un petit appareil lent sur une piste relativement longue et sèche) favorise une culture dans laquelle les remises des gaz sont à éviter? S’ils poursuivent une carrière en aviation comme pilotes professionnels, et qu’ils effectuent des vols dans des conditions plus difficiles, est-ce qu’ils continueront de penser de cette manière?

En tant qu’instructrice de vol, je crois que le renforcement des habiletés de base (c’est-à-dire, maintenir une assiette, effectuer des virages en descente à la vitesse indiquée et à au taux de descente assigné) doit se faire dès que possible et de façon régulière pendant la formation. Cela aide les élèves-pilotes à développer des habiletés qui leur sont très utiles pour apprendre à effectuer des approches stables et des atterrissages sécuritaires. Lorsque l’approche ne se déroule pas comme prévu – il faut encourager la bonne prise de décision en ce qui concerne les approches instables et insister sur les avantages d’une remise des gaz bien exécutée.

 

KATHY-FOX-2014 Author
Kathy Fox

Présidente / Bureau du président(e)
Bureau de la sécurité des transports du Canada /
Gouvernement du Canada